mercredi 5 février 2014
dimanche 29 avril 2012
CORPS ET GRAPHIE
Un nu de Yannick Zofer offre tout d’abord au regard une
surface, celle de la peau. Des peaux. Les visages sont absents, le cadre nous
amène à regarder le fragment et, même, la texture. La chair se donne comme
matière ; ici, pas de satin, mais du grain ; des plis ; du
volume ; une photographie à pétrir.
« Un corps trop parfait ne raconte rien », nous
dit Yannick. « J’ai besoin des écorchures, des défauts ». Ces
corps-là ont connu des blessures, les effets du temps, les excès parfois. Ils
nous invitent à y lire une histoire. Le photographe a renoncé cette fois aux
modèles professionnels, interchangeables, et échappe ainsi à la standardisation
des corps. Ici, chacun est singulier ; son histoire est unique et, en
cela, elle nous parle et parle de nous. Ces plis, ces boutons, ces poils
appartiennent à quelqu’un, à un individu, et par la magie du regard
photographique, le particulier est universel. « Je veux trouver la beauté
dans n’importe quel corps » : et c’est une beauté partout présente
que signale l’objectif.
Et au-delà de l’histoire des corps, on lit encore
« l’aventure humaine » de la séance de pose. « Je ne travaille
qu’avec des gens qui n’ont jamais posé. Les modèles doivent effectuer un
travail sur eux-mêmes et leur nudité, accepter leur image, celle de leur sexe,
le contact, au sein du groupe ». Ainsi, ce que capture l’image, c’est le
résultat d’une double transformation, extérieure — poses, postures, éclairage,
cadrage — et intérieure — « du mal-être au lâcher-prise ». Et notre
regard progresse depuis la surface jusqu’au cœur.
Rodolphe Arthaud
jeudi 28 février 2008
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